Méduses, alliées ou ennemies?
D’étranges invasions
Il n’a fallu que quelques jours de novembre 2007 pour que John Russel perde l’intégralité de ses saumons d’élevages. Quelques 400’000 poissons ont été littéralement étouffés par une gigantesque et fulgurante invasion de méduses. « Toute la baie était rouge et épaisse, se souvient-il. Je n’avais jamais rien vu de pareil. »
John Russel est le directeur de la seule et unique ferme de saumons située sur la côte Est irlandaise. Il y a neuf ans, l’homme a assisté impuissant à l’anéantissement de plusieurs années de travail. « Les jours précédents, rien ne laissait présager une telle catastrophe, me raconte-t-il au téléphone. La mer et la météo étaient tout à fait normales. Mes employés ont pris le bateau à huit heure du matin pour rejoindre l’une des cages où certains poissons devaient être pêchés. Quand ils se sont rendu compte qu’ils ne pouvaient presque pas avancer, ils m’ont téléphoné. Lorsque je suis arrivé au port, j’ai réalisé l’étendue du phénomène. Des millions de méduses flottaient dans la baie. Les moteurs des bateaux forçaient vraiment pour progresser dans cette soupe. Il nous a fallu deux heures et demie pour atteindre la première cage. » Arrivés sur place, John Russel et son équipe découvrent une situation catastrophique. Brûlés et stressés par les méduses, les saumons ont paniqué et coulé au fond du filet où ils se sont entassés les uns sur les autres. « Nous les avons vu suffoquer. Il n’y avait rien à faire pour les sauver. »
L’équipe de professionnels était complètement dépassée, n’ayant jamais vu cette espèce de méduse auparavant. « Elles étaient assez petites pour pouvoir se faufiler à travers les mailles des filets, se souvient l’éleveur irlandais. Elles étaient surtout trop nombreuses. Nous avions deux cages disposées à 11 miles (18 kilomètres) l’une de l’autre. Le banc de méduses occupait la totalité de la distance. Plus tard, un des rapports a précisé qu’elles étaient présentes jusqu’à 25 mètres de profondeur. Sur le moment, j’ai décidé de vérifier si c’était une espèce urticante, et j’en ai prises plusieurs dans la main. »
John Russel ressent alors un léger engourdissement, synonyme de catastrophe. En 2007, l’Union européenne venait d’adopter une nouvelle directive stipulant que tout poisson d’élevage tué par une méduse devait être incinéré. « Vous pouvez imaginer le travail de nettoyage que cela a impliqué, me dit John Russel. Non seulement il nous a fallu plusieurs jours pour nettoyer les cages, mais au bout du compte nous étions ruinés. Nous avons perdu environ 2.5 millions de livres sterling, et nous n’avons pu bénéficier d’aucune aide. Heureusement, nous avons pu relancer la ferme à partir d’avril 2008 lorsque des investisseurs privés ont racheté l’entreprise et payé nos dettes. » Aujourd’hui, Glenarm Organic Salmon Ltd. est toujours la seule ferme d’élevage de saumon sur la côte Est irlandaise.
John Russel et son équipe ont été les témoins d’un des phénomènes les plus mystérieux, imprévisibles et impressionnants du monde animal: un bloom de méduses. Bloom en anglais signifie « floraison » ainsi que « prolifération soudaine ». C’est un mot parfaitement adapté qui est aussi utilisé par les spécialistes francophones. En 2007, la côte irlandaise a été submergée par un bloom de Pelagia noctiluca, une espèce d’habitude connue pour sa présence régulière en Méditerranée. Que faisaient ces spécimens en si grand nombre aussi loin, au Nord-Est de l’Atlantique ? Est-ce qu’un gigantesque bloom s’est produit en Méditerranée, avant de sortir par le détroit de Gibraltar pour finir dans le Gulf Stream ?
« C’est peu probable, », répond Fabien Lombard, chercheur français à l’Observatoire Océanologique de Villefranche-sur-Mer. Dans son bureau donnant directement sur la magnifique rade, il m’explique : « Il faut savoir que les mouvements des masses d’eau méditerranéennes sont très bien documentées. Il y a des poches d’eau très salée à 600 ou 700 mètres de profondeur qui sont généralement acheminées vers le Nord. Par contre, les eaux moins profondes et les organismes de surface sont poussés vers le Sud par le courant principal qui longe les côtes espagnoles. Même si la Pelagia noctiluca est une méduse principalement connue et étudiée en Méditerranée, nous savons qu’il y a des souches dans l’Atlantique et dans d’autres océans. Selon moi, c’est plutôt une population qui vivait tranquillement au milieu de l’Atlantique qui a été ramenée par une tempête violente ou une déviation temporaire d’un courant sous-marin comme le Gulf Stream et qui est venue soudainement envahir les côtes irlandaises en 2007. »
Les causes exactes de ces blooms de méduses sont encore bien mystérieuses. Mais ces événements impressionnants sont liés irrémédiablement aux types de reproduction des méduses. Celles-ci varient d’une espèce à l’autre. Le cas de Pelagia noctiluca est assez simple. Les méduses adultes évoluent dans la colonne d’eau, dérivant au gré des courants, en pondant des œufs quotidiennement et ce, toute l’année. En hiver, quand l’environnement marin est relativement pauvre en zooplancton, la plupart des œufs fertilisés meurent à cause du manque de nourriture.
Au printemps, lorsque les heures d’ensoleillement ainsi que la température des eaux de surface augmentent, le phytoplancton produit d’énormes quantités de matières organique grâce à la photosynthèse. Il s’agit de la base de la chaîne alimentaire, sur laquelle vient se nourrir à son tour le zooplancton dont la population explose. Avec une telle profusion de nourriture disponible, les juvéniles de Pelagia noctiluca grandissent et développent leurs organes sexuels en quelques mois à peine. Dans le cas particulier de la Pelagia noctiluca, la reproduction est simple. Il parait raisonnable de penser que les blooms de ce type de méduses interviennent lorsque des conditions climatiques idéales se cumulent à un environnement marin riche en phytoplancton et en zooplancton, ainsi qu’à une grande quantité de méduses adultes et juvéniles présentes dans une même zone.
La situation se complique avec d’autres espèces de méduses. Comme par exemple l’Aurelia aurita ou méduse lune. Lorsque les conditions environnementales sont bonnes, celles-ci peuvent avoir une reproduction sexuée comme les Pelagia noctiluca : un oeuf fécondé devient une petite méduse juvénile. Mais si les conditions sont défavorables, certaines méduses adoptent ce qui pourrait s’apparenter à un mode de survie. L’oeuf fécondé coule au fond de l’eau et se fixe pour devenir un polype, c’est-à-dire un organisme ressemblant à un minuscule boyau vertical qui se termine par un orifice unique, bouche et anus, entouré d’une multitude de petites tentacules urticantes.
Le polype fixé au sol se nourrit dès lors du rare zooplancton qui passe à portée de ses tentacules. Ce polype peut rester plusieurs mois, voire des années, au fond de l’eau en colonisant lentement la zone alentour en se clonant en une multitude d’autres polypes identiques. Lorsque les conditions environnementales donnent le « signal » – une succession précise de variation de température dans le cas de la Aurelia aurita – un événement magique se produit alors : chaque polype « expulse » dans la mer plusieurs bébés méduses, un processus connu sous le nom de strobilation. Dans certains cas, de très grandes colonies reçoivent le signal au même moment, avec comme résultat la libération de centaines, de milliers, voire de millions de petites méduses prêtes à coloniser de nouveaux horizons au gré des courants marins.
« Les observations de ces blooms sont très subjectives et ponctuelles, me dit Jacqueline Goy. S’il n’y a ni laboratoire, ni navire de recherche dans la zone de pullulation, il se peut que l’on passe à côté du phénomène. » Jacqueline Goy est une scientifique française de plus de 80 ans qui a dédié sa vie à l’étude des méduses. Depuis les années 1960, elle a publié de nombreux livres et études sur le sujet, dont « Méduses, à la conquête des océans » en 2014. « Nous avons encore beaucoup de choses à apprendre, me glisse-t-elle. De nouvelles espèces sont régulièrement découvertes. J’en ai décrit une nouvelle pas plus tard que le mois dernier (septembre 2016). » Au fil des décennies, elle a été la témoin d’un basculement des écosystèmes. Aujourd’hui, elle est convaincue que nous sommes sur le point de passer à un système océanique gélatineux.
« Il est très difficile de généraliser quand on parle des méduses, affirme la scientifique française. Certaines espèces sont très courantes alors que d’autres sont très rares. Une espèce va plutôt vivre proche de la surface alors qu’une autre sera habituée aux grandes profondeurs et ne sera presque jamais observée. Certaines sont gigantesques et peuvent atteindre 6.5 mètres de long, alors que d’autres ne dépasseront pas les 2 millimètres. »
Selon la spécialiste, un fragile équilibre existait entre les proies et les prédateurs marins jusqu’à la fin des années 1990 et le début des années 2000. « Avec la surpêche, on a enlevé les poissons de l’équation et le système s’est dégradé, » ajoute-t-elle. Les méduses n’ont pas énormément de prédateurs. Le poisson lune et certaines tortues marines sont connues pour s’en nourrir presque exclusivement. Mais l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature (UICN) nous avertit régulièrement sur le statut fragile de ces prédateurs. « Les tortues disparaissent, me confirme Jacqueline Goy, et il y a très peu de poisson lune ou de schedophilus medusophagus connus sous le nom de rouffe de méduses. Le thon nous préoccupe encore plus car il régule la population de méduses méditerranéennes en la traversant pour aller se reproduire. »
Non seulement les prédateurs se font de plus en plus rares, mais la surpêche a également eu raison de la compétition dans bon nombre d’écosystèmes. Dans son livre « Méduses, à la conquête des océans, » Jacqueline Goy relate l’exemple édifiant du courant du Benguela. Jusque dans les années 1950, il faisait figure de haut lieu de la biodiversité sous-marine le long de la côte namibienne. Les eaux froides et exceptionnellement riches des profondeurs de l’Atlantique remontent à la surface et nourrissent un plancton particulièrement foisonnant dans cette région océanique. Les petits poissons pélagiques se régalaient alors tous azimuts, attirant les plus gros prédateurs du large tels les thons et les mérous.
Cette richesse semblant infinie, la pêche s’est intensifiée. Au début, les plus grosses proies ont été ciblées, et se sont rapidement raréfiées. Les pêcheurs en surnombre se sont alors rabattus sur de plus petites prises, tels les anchois et sardines. L’écosystème tout entier a basculé pour tendre vers un autre équilibre. Aujourd’hui, le courant du Benguela charrie toujours autant de nutriments, mais ce sont désormais les méduses qui se chargent de dévorer les quantités astronomiques de zooplancton présent, confortablement débarrassées de tout prédateur et compétiteur.
La pression sur la ressource halieutique n’est pas la seule cause de prolifération des méduses. Le professeur Ferdinando Boero étudie et surveille les populations gélatineuses de Méditerranée depuis plusieurs décennies. Il travaille à l’université de Lecce en Italie, et il m’explique comment notre gestion catastrophique des côtes favorise aussi la pullulation des méduses : « Beaucoup d’espèces ont un stade benthique, quand le polype reste fixé au fond marin. Ces polypes assurent la continuité de l’espèce, même lorsqu’aucun spécimen planctonique n’est présent dans la colonne d’eau. Les polypes ne peuvent pas se fixer n’importe où, car les fonds sablonneux ou boueux ne leur conviennent pas bien. Ils préfèrent la roche. Ces dernières décennies, nous avons largement colonisé le littoral, accélérant l’érosion côtière. Notre solution actuelle consiste à consolider les côtes en remplaçant le sable par des rochers. Ce sont autant de nouveaux espaces propices aux colonies de polypes, qui plus tard relâcheront des jeunes méduses en mer. »
Pour sa part, la scientifique Jacqueline Goy est particulièrement inquiète d’une situation sans précédent: au centre des grandes gyres océaniques, des tonnes de microparticules de plastiques s’accumulent. Selon la chercheuse, « certains polypes sont capables de se fixer sur des surfaces en plastique, même à la dérive. Nous n’avons actuellement pas assez d’informations, mais du fait des concentrations de plastiques au milieu des gyres océaniques, il pourrait y avoir des invasions de méduses au large alors que pour l’instant ces phénomènes sont limités à la zone côtière. »
Le plastique n’est pas la seule pollution qui favoriserait la pullulation des méduses. Elles profiteraient également des rejets agricoles qui sont charriés en importantes quantités par les fleuves dans les océans. Les perturbateurs endocriniens venant principalement de nos médicaments, qui passent à travers les filtres des stations d’épuration, ne semblent pas contrarier les espèces de méduses qui ont une reproduction asexuée. Par contre, les poissons et autres animaux marins subissent de plein fouet leurs effets négatifs. Le pire est à envisager dans les lieux qui cumulent plusieurs de ces facteurs aggravants. Ce scénario catastrophe est déjà devenu une réalité dans certaines régions du monde comme les eaux japonaises.
Au pays du Soleil Levant, les pêcheries sont fréquemment paralysées par les gigantesques méduses Nomura, qui peuvent peser jusqu’à 200 kilos chacune. En 2009, un chalutier japonais a chaviré avec son équipage à cause de ces monstres marins. Le filet que tentait de ramener le bateau était rempli de plusieurs dizaines d’individus. Ces méduses étaient réputées pour pulluler une fois tous les 40 ans. Depuis 2002, elles sont régulièrement retrouvées dans les filets des pêcheurs désabusés.
Tous ces signaux accablent les activités humaines, et sonnent l’alarme d’une gélification progressive des océans. Toutefois, et aussi surprenant que cela puisse paraître, un tout autre discours a récemment fait son apparition dans les médias. Cathy Lucas est une biologiste marine du Pays de Galle. Après avoir obtenu son diplôme universitaire en zoologie, elle a décidé d’étudier les méduses à l’université de Southampton au début des années 1990, alors que l’animal n’intéressait que très peu de gens. « Que l’objet de mes recherches soit devenu un sujet brûlant au cœur de nombreux débats n’est pas pour me déplaire, » m’avoue-t-elle.
Ce nouveau débat provient d’un article publié en 2013, intitulé : « Les pullulations récurrentes de méduses sont une conséquence des oscillations globales. » L’étude, réalisée par une équipe d’experts de la Global Jellyfish Group, un consortium international composé de climatologistes, océanographes, biologistes marins dont Cathy Lucas fait partie, peut être résumée ainsi : les populations globales de méduses augmentent et diminuent en suivant des oscillations mondiales d’une durée approximative de 20 ans. Il y a eu une phase d’augmentation dans les années 1990 et 2000 qui a contribué à notre perception d’une invasion progressive des méduses. Une précédente période d’augmentation dans les années 1970 est passée inaperçue, dû au manque de données et à l’absence d’un outil de partage d’information. Aujourd’hui, avec Internet, un tel événement ne pourrait plus passer inaperçu.
« Ce projet a été le premier où nous avons pu compiler les données des océans du monde entier, m’explique la biologiste britannique. Notre étude a conclu qu’il n’y avait aucune preuve scientifique d’une augmentation globale des populations de méduses. » Une conclusion très surprenante, appuyée par l’étude dont le titre traduit de l’anglais est le suivant : « Des citations scientifiques biaisées ont participé à une perception sans fondement d’une augmentation des blooms de méduse. » D’après cette étude, publiée dans le journal Global Ecology and Biography en 2016, 48.9% des publications scientifiques auraient une mauvaise interprétation des sources, et annonceraient à tort que les populations de méduses augmentent, globalement. Une étude en particulier a influencé une large portion du réseau de citation. Publiée en 2001, elle est en réalité très neutre, ce qui ne l’a pas empêchée « d’être devenue malgré elle le point d’origine d’une chaîne de citations inappropriées puisque son titre était formulé en question : « Les blooms des méduses : est-ce que les populations mondiales augmentent en réponse au changement des conditions océaniques ? » »
La communauté scientifique est visiblement divisée sur ce point. Sommes-nous de retour à la case départ ? Loin de là. Comme me l’a si bien dit Cathy Lucas, un vrai débat scientifique a été initié et fait avancer les recherches d’aujourd’hui : « Il y a actuellement des gens qui disent que les populations de méduses augmentent, et d’autre affirment le contraire. Qu’est-ce que cela nous a apporté ? Cela a permis de porter ce sujet au centre des attentions des branches dominantes de l’étude marine. Aujourd’hui, je rencontre de plus en plus de personnes intéressées par les pullulations de méduses. Il peut s’agir de professionnels de la mer ou de spécialistes en flux de carbone, d’experts en recherches moléculaires ou en clonage, etc. Nous avons une plus grande diversité de scientifiques qui sont aujourd’hui très intéressés par les recherches que nous menons. »
Le sujet suscite toujours plus d’intérêt, mais il y a un sérieux rattrapage à faire. « Lors des cinq dernières années, me précise Cathy Lucas, une grande partie de la recherche a été dédiée à répondre à deux questions primordiales. La première est de savoir si les pullulations de méduses augmentent ? La seconde, quelles en sont les causes ? Il y a une multitude de facteurs, car certaines espèces de méduses ont des cycles de vie très compliqués, avec un stade benthique (fixé sur le fond marin) et un stade pélagique (libre dans l’eau). C’est un tableau extrêmement complexe que nous devons intégrer à des phénomènes régionaux comme les variabilités climatiques locales ou les modèles hydrodynamiques. C’est un challenge qui va sûrement m’occuper pour les 10 ou 20 prochaines années. A l’avenir, notre but est de prédire la situation de l’année à venir en fonction des populations de méduses. Il s’agit d’une information cruciale pour certaines centrales électriques par exemple. »
La méduse lune, Aurelia aurita, est l’une des espèces les plus étudiées au monde. Elle ne mesure que quelques centimètres de diamètre, ce qui ne l’empêche pas d’inquiéter très sérieusement les ingénieurs d’une des structures les plus sophistiquées jamais imaginées et construites par l’homme : la centrale nucléaire. En Suède, la centrale d’Oskarhamn est l’une des plus grandes au monde. Malgré toutes les mesures de sécurité, elle a dû être arrêtée d’urgence en octobre 2013. Au bord de la mer Baltique, elle aspire des quantités faramineuses d’eau de mer pour refroidir ses réacteurs. C’est la raison principale qui a motivé sa construction au bord d’un plan d’eau, comme la centrale de Fukushima au Japon. Lorsqu’une fantastique pullulation de méduses lunes s’est faite aspirer par les pompes de refroidissement, le système entier s’est bouché. Il a fallu arrêter la centrale de toute urgence, et trois jours ont été nécessaires pour nettoyer les tuyaux.
« Il y a plusieurs centrales nucléaires sur les bords de la mer Baltique, souligne Jacqueline Goy, la chercheuse française. Comme nous le savons, elles ont toutes besoin d’eau froide pour refroidir les réacteurs. Lorsque l’eau est recrachée en mer, elle ressort à 16°C toute l’année. Cela perturbe le cycle biologique de l’Aurelia aurita, qui est une méduse qui ne se reproduit que quand la mer atteint une certaine température. Aux pieds des centrales, les Aurelias ont trouvé leur bonheur et se reproduisent donc constamment. Mes collègues sur place parlent de soupe de méduses. »
Ces pullulations sont fascinantes, de par leur amplitude et ce qu’elles peuvent impliquer pour l’homme et la nature plus généralement. Historiquement, les méduses ont été négligées par la science, alors qu’elles sont présentes dans nos océans depuis plus de 500 millions d’années. Ce sont les plus anciens organismes pluricellulaires de notre planète et elles semblent avoir encore beaucoup de choses à nous apprendre.